N° 22/30 | À ta santé, vieille branche !
Les arbres sont des êtres vivants qui ont besoin de “boire”. Sans eau, ils meurent. Un phénomène qu’il est urgent de mieux comprendre tant le réchauffement climatique et les sécheresses à répétition menacent les puits de carbone si précieux que sont les forêts.
Sans eau, la plante risque l’embolie
Stress mécanique, lié au vent, stress thermique, ou stress hydrique… les arbres sont des êtres vivants qui subissent les effets de l’environnement. Au centre INRAE Auvergne-Rhône-Alpes, Université Clermont Auvergne, l’équipe de Hervé Cochard, écophysiologiste au Laboratoire de physique et physiologie intégratives de l’arbre en environnement fluctuant, étudie le fonctionnement hydraulique des différentes espèces d’arbres, ainsi que l’impact des sécheresses. Car l’arbre a un impératif besoin d’eau, jusqu’à plusieurs centaines de litres par jour. Puisée par les racines, l’eau est véhiculée par la sève en direction du feuillage d’où elle s’échappe, par évapotranspiration. La consommation dépend des conditions ambiantes et joue un rôle clé pour la photosynthèse, l’apport de minéraux, le refroidissement du feuillage… Lorsque l’eau manque ou que l’arbre puise plus intensément dans le sol, des bulles de vapeur risquent de se former, obstruant les vaisseaux qui transportent la sève. C’est la cavitation, qui peut provoquer l’embolie et la mort de l’arbre.
Le cavitron, un outil développé sur mesure
Ce phénomène de cavitation est un risque qui peut croître dès lors que le climat se réchauffe. Pour le documenter et le comprendre, Hervé Cochard et son équipe ont créé, en 2002, le Cavitron, désormais utilisé dans plusieurs laboratoires du monde. Cette centrifugeuse permet de générer des courbes de vulnérabilité de l’arbre à la cavitation et mesure ainsi sa résistance à la sécheresse. Les résultats montrent que les arbres sont loin d’être égaux face au manque d’eau. Le peuplier, par exemple, est très vulnérable à la cavitation, quand le buis et certains cyprès sont parmi les plus résistants. Ils sont adaptés aux milieux secs et pourront plus facilement résister à une sécheresse. Les études ont également expliqué les stratégies des plantes pour s’adapter.
Comprendre les arbres pour mieux gérer les forêts
Récompensé en 2020 du Laurier Défi scientifique de l’INRAE, Hervé Cochard est initiateur d’un « véritable courant français de pensée scientifique en matière d’hydraulique des arbres qui fait désormais autorité » (INRAE). Non seulement les travaux permettent de mieux comprendre le fonctionnement des végétaux face au manque d’eau, et d’étudier leurs réponses, telles que l’acclimatation, la migration ou encore l’adaptation, mais en plus, ils servent à déployer des applications. En effet, les modèles produits aident à simuler le développement des forêts, à prédire le risque de mortalité lié aux sécheresses et, ainsi, à mieux anticiper la gestion des forêts sur le long terme.
Pour aller plus loin : La cavitation expliquée aux enfants Hervé Cochard [vidéo] https://youtu.be/ye0NIBfwIwc