N° 06/30 | On a retrouvé les boîtes noires du cerveau…
Difficile à observer, le cerveau est un organe complexe et mystérieux, à tel point qu’il a longtemps été considéré comme une “boîte noire”. Des stimuli lui parviennent, des réactions et des décisions en découlent, mais que se passe-t-il entre les deux ? Grâce à Marc Jeannerod et à son Institut des sciences cognitives, on en sait aujourd’hui beaucoup plus.
Le cerveau, mystérieux et fascinant
À part le coeur, aucun organe du corps humain n’a suscité un imaginaire aussi riche que le cerveau, mêlant pensée magique, scientifique et religieuse. Depuis l’antiquité, il fascine. Mais tandis que le coeur a livré presque tous ses secrets, le cerveau résiste encore. Il faut dire que sa structure parmi les plus complexes – avec près de 85 milliards de neurones et plus de 120 milliards de cellules gliales ! – et son fonctionnement en font un organe à la croisée de disciplines comme la biologie, la psychologie, la philosophie, la linguistique, pour ne citer qu’elles. Associer les sciences pour mieux comprendre le fonctionnement de l’esprit, tel a été le pari de Marc Jeannerod, quand, en 1997 et après des années d’efforts, il ouvre l’Institut des sciences cognitives (ISC).
Marc Jeannerod, un précurseur
Élève de Michel Jouvet, médecin, professeur de physiologie, et chercheur en neurophysiologie et neuropsychologie, Marc Jeannerod étudie les rapports entre la vision et l’action. Il s’intéresse ainsi directement aux mécanismes qui relient, dans la “boîte noire” du cerveau, la stimulation visuelle (par exemple, la vision d’un objet) et l’action du corps qui s’ensuit (saisir l’objet). Il montre qu’un phénomène d’anticipation de l’action physique se met en place dès l’étape de perception sensorielle. Ainsi, « l’activité cognitive repose sur la simulation, par le système nerveux, de l’exécution d’une action » (Inserm). Ses travaux lui ont permis de développer le concept de maximum grip aperture (ouverture maximale de la pince) ou MGA, devenu la référence internationale pour l’évaluation du geste de préhension.
L’Institut des sciences cognitives (ISC)
Mais le chercheur n’a pas seulement renouvelé la conception de l’activité mentale de l’époque. Il a également contribué à structurer en France une nouvelle discipline, les sciences cognitives, en important à Bron la “révolution cognitive” née dans les années 50 aux États-Unis. C’est ainsi qu’est né l’ISC, qui porte aujourd’hui son nom. Dans ce lieu atypique dédié à l’étude de la cognition naturelle, se côtoient quotidiennement des chercheurs de formations très diverses, allant des mathématiques aux sciences de l’ingénieur, en passant par les sciences de la vie, mais aussi de l’homme et de la société.
Pour aller plus loin : Marc Jeannerod, « La création de l’Institut des sciences cognitives du CNRS (1992-1998) », La revue pour l’histoire du CNRS [En ligne], 10 | 2004.