N° 01/30 | Miroir mon beau miroir, montre-moi tes ondes gravitationnelles
Ce n’est pas pour les beaux yeux de la méchante belle-mère de Blanche-Neige que le Laboratoire des matériaux avancés (LMA) fabrique les miroirs les plus parfaits au monde. C’est pour équiper des instruments de haute technologie, les interféromètres, qui permettent de détecter les ondes gravitationnelles.
Vérifier les prédictions d’Einstein !
En 1916, Albert Einstein avait prédit, dans le cadre de sa théorie de la relativité générale, l’existence d’ondes gravitationnelles. Pour l’illustre physicien, la gravitation provient de la courbure de l’espace-temps produite par le déplacement des objets, tels que les planètes, les étoiles ou les trous noirs. Plus ceux-ci ont une masse élevée, plus la courbure est forte et donc plus la gravité est importante. C’est cet effet qui régit l’interaction de tous les objets de l’univers et que l’on connait bien sur terre, puisqu’il se manifeste par l’attraction terrestre. Tout corps lancé en l’air retombe sous l’effet de la gravité. Lorsque Einstein avait formulé sa théorie, il avait prédit que dans certaines circonstances la perturbation de l’espace-temps pouvait provoquer une onde gravitationnelle, un peu à la façon dont une pierre jetée dans l’eau produit une onde qui se déplace à la surface. Mais personne, jusqu’en 2016, n’avait encore pu observer une telle onde. Une avancée qui n’aurait pu être réalisée sans les miroirs exceptionnels du LMA qui équipent les interféromètres.
Des miroirs dans les interféromètres !
Un interféromètre est un instrument de mesure des interférences. Son principe repose sur la séparation d’un rayon laser en deux faisceaux perpendiculaires qui, après avoir parcouru plusieurs km, sont chacun renvoyés à leur point d’émission par des miroirs afin de détecter un éventuel écart de fréquence. Ainsi sont enregistrées les oscillations de l’espace-temps provoquées par les ondes gravitationnelles. C’est là qu’intervient le LMA dont les miroirs les plus réfléchissants au monde – capables de renvoyer 99,9999 % de la lumière incidente – équipent les interféromètres du Japon (KAGRA), d’Italie (VIRGO) ou des Etats-Unis (LIGO). Pour cela, les ingénieurs du LMA déposent une mince couche, de l’ordre du micron (0,007 millimètre d’épaisseur), à la surface d’un bloc de verre ou de saphir parfaitement pur et poli.
Une avancée majeure pour la science
Étroitement associé à la communauté LIGO-VIRGO, le LMA a ainsi contribué à une découverte majeure. En 2016, 100 ans après la prédiction de l’existence des ondes par Einstein, les chercheurs ont annoncé avoir observé les ondes gravitationnelles produites par une coalescence, nom donné à la fusion de deux trous noirs. Et l’avenir est prometteur ! Le LMA est associé à d’autres projets d’envergure. La construction du Einstein Telescope, grand interféromètre européen enterré, avec des bras de 10 km, devrait démarrer en 2026. Quant au Laser Interferometer Space Antenna (LISA), il sera lancé dans l’espace en 2032 ! Deux équipements dont la sensibilité et la précision permettront d’observer plus finement encore les âges anciens de l’univers et ses mystères.
Pour aller plus loin : Les miroirs les plus parfaits du monde [Vidéo CNRS]